Une naissance clandestine
 

  • Les premiers clubs de jazz clandestins

Le quartier de Storyville situé à la Nouvelle-Orléans était connu pour ses divertissements, comme la prostitution, spécifique à ce lieu car c'était le seul où elle était autorisée, depuis l'arrêté de 1897. Le Magohany Hall, construit en 1897 par Lulu White (surnommée "la Reine de Storyville"), est l'une des principales maisons closes où avait lieu la prostitution. Cependant, avec l'arrivée de la Première Guerre Mondiale, les soldats ont eu l'interdiction de fréquenter les prostituées, car le Ministère de la Marine voulait les garder en bonne santé moralement. Ainsi, en 1917 a lieu la fermeture de Storyville. Cet acte déclenche un fort exode des musiciens vers les villes du Nord et en particulier à Chicago, Detroit, ...  On a ainsi une certaine trace de la route que le jazz a parcourue.

Le "quartier chaud" conserve malgré tout son côté animé mais plus modérément durant les années suivantes. On y trouve des salles de danse, des cabarets et des restaurants. En 1920, la loi de la prohibition est instaurée, c'est la période pendant laquelle la fabrication, la vente et le transport d'alcool sont interdits. Le jazz est alors entendu dans les “speakeasies” (en français "bars clandestins"). Littéralement, "speak easy" signifie "parler doucement", ce qui se justifiait par le fait que, dans ces bars, les clients devaient baisser la voix lorsqu'ils demandaient de l'alcool, afin de ne pas attirer l’attention. Ces lieux étaient tenus secrets car illégaux puisque la mafia y faisait de la contrebande en distribuant de l'alcool et où les musiciens trouvaient du travail. Ces bars clandestins gagnèrent en popularité entre les années 1920 et 1930.

Dans ces bars avaient lieu des "cutting contests", autrement dit, des batailles musicales entre des musiciens de jazz. Plusieurs musiciens se démarquèrent dans ce domaine, dont un en particulier : Buddy Bolden, surnommé "The King".

      

                                                              Buddy Bolden (1870-1931)

 

  • Les premières grandes figures

    De nombreux musiciens de la Nouvelle-Orléans ont débuté dans les fanfares (comme Jelly Roll Morton par exemple) pendant des défilés, des enterrements, et principalement pendant des carnavals pour mardi gras. Ces fanfares étaient organisées commes des orchestres militaires. Elles jouaient des marches pour les défilés mais également des morceaux en vogue, tels que High Society et My Maryland. Les jazzmen jouaient également lors des enterrements. Ils célèbraient le côté joyeux, jouaient des cantiques comme Just a closer walk with thee. Lors des retours des enterrements ils jouaient des morceaux rapides pendant que les gens dansaient.

Lors de la naissance du jazz, plusieurs artistes se sont faits connaître et ont été considérés comme les premières grandes figures du jazz, telles que l'Original Dixieland Jass Band composé de cinq musiciens blancs. Ils sortent le premier disque de jazz intitulé Jass. En 1917, ils enregistrent leur 78 tours dont les deux morceaux Livery Stable Blues (www.youtube.com/watch?v=5WojNaU4-kI) et Dixie Jass Band One-Stepsort (www.youtube.com/watch?v=mW7rldvqN1w), ce sont les premiers disques de jazz, ce groupe est cependant qualifié de caricature des jazzmen noirs (les morceaux de l'Original Dixieland Jass Band mettant surtout en avant les "gimmicks pittoresques", des bruits de klaxon et des imitations de bruits d'animaux, plutôt que la musicalité). Dans la même année, de nombreuses chansons contenant le mot "blues" sont écrites par différents groupes.

Original Dixieland Jass Band

 

En 1901, le cornettiste Joseph Oliver est sacré "Roi du jazz" et prend le surnom de King Oliver. Il était le professeur et le mentor de Louis Armstrong, qu'il a inclus dans son groupe le King Oliver's Jazz Band (également appelé le Créole Jazz Band), créé en 1922. Par la suite, la future épouse de Louis Armstrong, la pianiste Lil' Hardin, rejoindra également le groupe de Joseph Oliver, dont font également partie Baby Dodds, Honoré Dutrey, Bill Johnson et Johnny Dodds. Ce groupe est un exemple typique du jazz New Orleans classique.

 

 

 

 

   

      King Oliver (1885-1938)                                    King Oliver's Jazz Band

 

Bill Johnson (1872-1972) est l'un des premiers jazzmen. Dans les années 1910, il fonde et dirige un groupe de jazz, l'Original Creole Orchestra, qui quitte la Nouvelle-Orléans pour faire le tour des Etats-Unis. Puis, au début des années 1920, il rejoint le King Oliver's Jazz Band à Chicago. Dans la même ville, il enregistre plusieurs disques. Il continue ensuite de jouer dans différents groupes, parfois sous d'autres pseudonymes (son vrai nom étant William Manuel Johnson) jusque dans les années 1950.

Bill Johnson

Tandis que Buddy Bolden (1877-1931) est considéré comme le premier homme du jazz, le musicien considéré comme l'inventeur du jazz est Jelly Roll Morton, qui a commencé sa carrière à Storyville et a prétendu lui-même avoir ce titre de créateur du jazz.

Lors de la fermeture de Storyville, certains musiciens rejoignent de plus grandes vedettes à Chicago comme le pianiste Jelly Roll Morton, le clarinettiste Sidney Bechet et les trompettistes King Oliver et Louis Armstrong.